mercredi 18 décembre 2024

4. L'Interprétation du rêve : état de l'art et problèmes généraux en 1900

(Enregistrement de la séance

Transcription de la séance par Francisco Capoulade

A/ Transition : signification morale et politique d'une réflexion théorico-critique sur l'interprétation psychanalytique des rêves dans le contexte actuel

Effroi et traumatisme: quand l'impensable n'est plus un échec de la raison mais cause un délabrement de l'appareil psychique. Rêve d'angoisse et vie "comme dans un cauchemar". La psychanalyse, réponse à cet état socio-historique contemporain. Freud: névrose individuelle avant 1914, malaise dans la "culture" après 1920; passage de la psychothérapie à une réflexivité critique élargie sur la modernité.

Face à l'intensification de l'effroi, les dilemmes du savant-intellectuel. Mannheim: utopie libérale, romantisme conservateur, existentialisme et "reprimitivisation" (fascisme). Reich, Lukacs, l'école de Francfort et l'explication psychanalytique du fascisme. Par contraste, les enjeux d'un examen pratique de l'accès à un inconscient dont les modalités évoluent (via le rêve et son interprétation, "voie royale" vers l'inconscient). Idée directrice du parallèle intégration/désintégration tant du côté sociogénétique que psychogénétique: des conflits dans la vie consciente (névrose) aux fragilités ultimes de la constitution du soi (trouble narcissiques, "états limites").

B/ Les trois premières préfaces (1900, 1909, 1911)

1900. La série rêve/phobie (hystérique)/représentation de contrainte/idée délirante. Le rêve sans être une pathologie doit pouvoir les éclairer (sur le plan de la production des images). Mais il manque encre une théorie de la sexualité et de son rôle dans les névroses. Le problème de la "vérification subjective" d'une hypothèse empirique généralisé. Le rôle déterminant du rêve "immoral".

1909. Meilleure connaissance des névroses qui rejaillit désormais sur celle du rêve. Le livre comme réaction à la mort du père. Mais la Traumdeutung ne serait-elle pas, alors, réductible au "cas Freud?" (ou au cas de l'endeuillé ?). Abandon de toute discussion des théories alternatives du rêve.

1911. Sortir du "cas Freud" par une science cliniquement cumulative du symbolisme inconscient (du penser inconscient). Risque, toutefois, de régresser au dictionnaire impersonnel des rêves.

C/ Examen du chapitre 1, le "buisson d'épines" (à Fliess, 28/05/1898)

Déduire l'image synthétique qui résulte d'approches à la fois partielles et contradictoires. Pour cela, bloquer certaines théories qui l'empêche:

  • Contre la théorie du rêve comme état mental désagrégé. L'argument de l'hypermnésie, et surtout du rêve immoral (le désir "indésirable" reste un désir).
  • Contre la théorie explicative par les stimuli corporels.
  • L'intuition de Fechner: aucun déficit dans le rêve, mais une "autre scène"

En revanche, position qui s'esquisse à l'arrière-plan: une sémantique du rêve reposant sur une intentionnalité d'ordre conatif (affect et désir en quête d'objet). Il y aurait donc un "penser inconscient" dont les voies sont symbolico-affectives (Scherner). Eclaircissement sur l'associationnisme freudien.

lundi 2 décembre 2024

3. Préliminaires à une lecture de la Traumdeutung de Freud: une philosophie de l'esprit inconscient, une forme nouvelle de réflexivité sociale sur l'individu moderne (3)

Références bibliographiques

S. Freud, L'Interprétation du rêve, OCP IV, 2003, PUF. (voir en ligne)

D. Anzieu, L'Auto-analyse de Freud et la découverte de la psychanalyse, vol.1 et 2, 1975², PUF (pas l'édition réduite en un seul volume).

D. Bourdin, Sigmund Freud, L'Interprétation des rêves, 2005, Bréal (un aide-mémoire précis et utile).

P.-H. Castel, Introduction à L'Interprétation du rêve de Freud. Une philosophie de l'esprit inconscient, PUF, 1998. Voir notamment l'Avant-propos et la préface de ce livre, ainsi que mon Résumé analytique de la Traumdeutung.

A. Mayer & L. Marinelli, Rêver avec Freud. L'histoire collective de L'Interprétation du rêve, Aubier, 2009. Voir mon analyse dans NonFiction.

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(Enregistrement de la séance)

A/ Introduction: programme d'études de ce séminaire

1. La Traumdeutung comme un texte de philosophie de l'esprit.

2. Mais ce texte qui est une théorie générale de l'esprit a également institutionnalisé une nouvelle forme de réflexivité collective (la psychanalyse, ses controverses). Contexte éliasien de ma démarche. Or les conditions d'émergence de la psychanalyse (avec la théorie du rêve comme intégrateur "métapsychologique" en 1900) ne sont pas celles de son développement et de son extension (de l'inclusion, y compris comme "erreur exemplaire", du "mouvement psychanalytique" dans le "processus de civilisation" moderne, au-delà de Freud).

3. Une lecture épistémologique "expressiviste" de l'émergence et de la stabilisation des concepts-clés de la doctrine psychanalytique du rêve/rêver à partir des pratiques effectives. Une mise en parallèle desdites pratiques avec les attentes normatives, mais aussi les contraintes structurales, qui régissent la quête d'une guérison-libération "psychique" dans les sociétés individualistes modernes en évolution.

4. L'hypothèse ultime de cette mise en perspective socio-historique longue de la Traumdeutung. L'idée à la Elias d'une évolution des appareils psychiques des individus, après et à cause des théories freudiennes du rêve.

5. Méthode de travail.

B/ Premières hypothèses et questions sur l'évolution de la théorie psychanalytique du rêve après les années 1930, puis après Freud

1. Point de départ: A. Mayer & L. Marinelli, Rêver avec Freud. L'histoire collective de L'Interprétation du rêve. .

2. Retour philosophique et psychanalytique sur le travail de Mayer et Marinelli..

3. La dynamique intellectuelle de la théorie du rêve après Freud (1932: "Les psychanalystes se comportent comme s’ils n’avaient plus rien à dire sur le rêve, comme si la doctrine du rêve était close.") Premiers jalons.

  • L'établissement d'une orthodoxie du rêve-effet empirique-du-refoulement (Anna Freud et la "psychologie psychanalytique"). En pratique, l'analyste "sain" ne devrait pas rêver de son patient. Le problème du contre-transfert.
  • Ferenczi, le disciple qui anticipe les développements très ultérieurs de la psychanalyse: la fonction "traumatolytique" du rêve.
  • Melanie Klein et l'idée de "phantasme" (inconscient) dont le rêve est l'expression (ainsi qu'un moyen de se défendre contre lui). On part de l'enfance, et cela ruine l'articulation classique rêve // psychose.
  • Le moment Ella Sharpe (fin des années 1930): Dream Analysis. A Practical Handbook, 1937. A la fois une théorie néo-kleinienne (issue également de Ferenczi) du corps symbolisé/symbolisant dans le rêve, et une théorie rhétorique-poétique du travail (créateur) du rêve.
  • Lacan, lecteur critique d'Ella Sharpe ("Le désir et son interprétation", séminaire 1958-1959): le travail du rêve plus que les pensées du rêve, et le jeu du signifiant comme facteur central du déchiffrement du rêve (le rêve imaginarise le symbolique, l'interprétation (re-)symbolise l'imaginaire). Dé-psychologisation relative du rêve.
  • Bion après Melanie Klein (et Ferenczi): le rêver-processus (dreaming) comme traitement originaire des excitations, et la création de l'espace interne par ce même processus. Une métapsychologie entièrement nouvelle, fondée sur la "rêverie" en séance.
"Freud attribue au travail du rêve seulement la fonction de cacher les faits de la vie mentale interne – uniquement les pensées du rêve. […] le rêve semble jouer dans la vie mentale de l’individu un rôle analogue aux processus de digestion dans la vie alimentaire de l’individu. […] si quelqu’un peut rêver, alors il peut “digérer” les faits et ainsi apprendre par l’expérience" (Bion, in Cogitations)
  • Meltzer: Dream Life. A Re-examination of the Psychoanalytic Theory and Technique, 1983. Réfutation explicite de la Traumdeutung (de son psychologisme scientiste périmé et de son formalisme indifférent à la création de sens) au nom des acquis kleiniens-bioniens. La vie éveillée n'est que le contenu manifeste d'un rêve latent qui ne cesse jamais. Contre Freud, qui "ne croyait pas que les rêves puissent exprimer quelque chose de nouveau."

4. Conclusion: la nécessité d'un contexte socio-historique large. On ne saurait en rester à des formations discursives mises en relation extérieures avec des formations sociales. L'approche expressiviste: rendre explicite dans les concepts les règles suivies en pratique. Les conditions pratiques de la cure: étroites (cliniques, institutionnelles) et larges (sociales et politiques). Emergence d'une nouvelle "grammaire du rêver".

mercredi 13 novembre 2024

2. Préliminaires à une lecture de la Traumdeutung de Freud: une philosophie de l'esprit inconscient, une forme nouvelle de réflexivité sociale sur l'individu moderne (2)

Références bibliographiques

S. Freud, L'Interprétation du rêve, OCP IV, 2003, PUF. (voir en ligne)

S. Freud, L'Interprétation des rêves, tr. fr. J.-P. Lefebvre, 2010, Seuil.

S. Freud, L'Interprétation/La Science des rêves, tr. fr. I. Meyerson, entièrement révisée par D. Berger, 1926, 1967², PUF.

D. Anzieu, L'Auto-analyse de Freud et la découverte de la psychanalyse, vol.1 et 2, 1975², PUF (pas l'édition réduite en un seul volume).

D. Bourdin, Sigmund Freud, L'Interprétation des rêves, 2005, Bréal (un aide-mémoire précis et utile).

P.-H. Castel, Introduction à L'Interprétation du rêve de Freud. Une philosophie de l'esprit inconscient, PUF, 1998. Voir notamment l'Avant-propos et la préface de ce livre, ainsi que mon Résumé analytique de la Traumdeutung.

A. Mayer & L. Marinelli, Rêver avec Freud. L'histoire collective de L'Interprétation du rêve, Aubier, 2009.

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(Enregistrement de la séance)

A/ Introduction: programme d'études de ce séminaire

1. La Traumdeutung comme un texte de philosophie de l'esprit.

2. Mais ce texte qui est une théorie générale de l'esprit a également institutionnalisé une nouvelle forme de réflexivité collective (la psychanalyse, ses controverses) en lien immédiat avec une nouvelle pratique thérapeutique-émancipatrice: l'association libre sur les rêves (les symptômes, les fantasmes), dans la cure-type. C'est la réflexivité exigible d'un projet de vérité sur soi "par soi" typique de l'individualisme moderne (son idéal d'autonomie). Contexte éliasien de ma démarche: le Freud auteur de la Traumdeutung: un Juif libéral en Autriche-Hongrie avant 1914. Rationalisme progressiste des Lumières, universalisme, scientisme, historicisme, économisme. Or les conditions d'émergence de la psychanalyse (avec la théorie du rêve comme intégrateur "métapsychologique" en 1900) ne sont pas celles de son développement et de son extension (de l'inclusion, y compris comme "erreur exemplaire", du "mouvement psychanalytique" dans le "processus de civilisation" moderne, au-delà de Freud).

Après Freud, donc, examiner le kleinisme (Meltzer contre la Traumdeutung), ou Lacan (le rêve n'est plus qu'un domaine où s'illustre les "jeux du signifiant"), Bion enfin (le rêver-processus, dreaming). Or tout cela s'appuie sur des procédés techniques et des idéaux thérapeutiques-émancipateurs ainsi que sur des compréhensions idéologiques-sociales du "malaise dans la culture" (et donc des types de patients) chaque fois distincts.

3. Une lecture épistémologique "expressiviste" de l'émergence et de la stabilisation des concepts-clés de la doctrine psychanalytique du rêve/rêver à partir des pratiques effectives. Une mise en parallèle desdites pratiques avec les attentes normatives, mais aussi les contraintes structurales, qui régissent la quête d'une guérison-libération "psychique" dans les sociétés individualistes modernes en évolution.

4. L'hypothèse ultime de cette mise en perspective socio-historique longue de la Traumdeutung. D'abord une connexion entre philosophie de l'esprit (de la connaissance, épistémologie) et sociologie historique de la connaissance (à la Durkheim, Formes élémentaires de la vie religieuse) de l'émergence de catégories réflexives générales (inconscient sexuel, refoulement, Œdipe, etc.). Ensuite (à la Elias) l'idée d'une évolution réelle des appareils psychiques des individus, après et à cause des théories freudiennes du rêve.

5. Méthode de travail.

B/ Premières hypothèses et questions sur l'évolution de la théorie psychanalytique du rêve après les années 1930, puis après Freud

1. Point de départ: A. Mayer & L. Marinelli, Rêver avec Freud. L'histoire collective de L'Interprétation du rêve. Les trois phases de l'histoire du texte. Quelques points critiques dans l'histoire de sa réception et de sa diffusion: l'idée d'auto-analyse, la résistance suisse à la notion de rêve "gardien du sommeil", le problème du symbolisme et le cas spécial du "complexe" d'Œdipe, les problèmes liés à la traduction. A chaque fois, parallèle entre une formation discursive-théorique et une formation sociale: théorie du rêve et institutionnalisation/"impersonnalisation" de la psychanalyse.

2. Retour philosophique et psychanalytique sur le travail de Mayer et Marinelli. Formation discursive matérialisée dans un livre-dispositif (multi-couches) vs. réseau conceptuel caractérisé par les inférences nécessaires et les incompatibilités (Koselleck vs. Duso). La question du sens et de la vérité des énoncés en histoire des idées et des sciences. Mais aussi du point de vue sociologique, plusieurs paradoxes: l'auto-analyse implique-t-elle de s'identifier à Freud? Peut-on alors arriver à une impersonnalité dans la démarche? Le "dictionnaire de symboles" comme fausse piste pour concevoir l'institutionnalisation de la psychanalyse: quelques alternatives.

3. La dynamique intellectuelle de la théorie du rêve après Freud. Premiers jalons.

  • L'établissement d'une orthodoxie du rêve-effet empirique-du-refoulement (Anna Freud et la "psychologie psychanalytique"). En pratique, l'analyste "sain" ne devrait pas rêver de son patient. Le problème du contre-transfert.
  • Melanie Klein et l'idée de "phantasme" (inconscient) dont le rêve est l'expression (ainsi qu'un moyen de se défendre contre lui). On part de l'enfance, et cela ruine l'articulation classique rêve // psychose.
  • Le moment Ella Sharpe (cours des années 1930): Dream Analysis. A Practical Handbook, 1937. A la fois une théorie néo-kleinienne (issue également de Ferenczi) du corps symbolisé/symbolisant dans le rêve, et une théorie rhétorique-poétique du travail créateur du rêve.
  • Lacan, lecteur critique d'Ella Sharpe ("Le désir et son interprétation", séminaire 1958-1959): le travail du rêve plus que les pensées du rêve, et le jeu du signifiant comme facteur central du déchiffrement du rêve (le rêve imaginarise le symbolique, l'interprétation (re-)symbolise l'imaginaire). Dé-psychologisation relative du rêve.
  • Bion après Melanie Klein: le rêver-processus (dreaming) comme traitement originaire des excitations, et la création de l'espace interne par ce même processus. Une métapsychologie entièrement nouvelle, fondée sur la "rêverie" en séance.
  • Meltzer: Dream Life. A Re-examination of the Psychoanalytic Theory and Technique, 1983. Réfutation explicite de la Traumdeutung (de son psychologisme scientiste périmé) au nom des acquis kleiniens-bioniens. La vie éveillée n'est que le contenu manifeste d'un rêve latent qui ne cesse jamais.

4. Nécessité d'un contexte socio-historique large. On ne saurait en rester à des formations discursives mises en relation extérieures avec des formations sociales. L'approche expressiviste: rendre explicite dans les concepts les règles suivies en pratique. Les conditions pratiques de la cure: étroites (cliniques, institutionnelles) et larges (sociales et politiques). Emergence d'une nouvelle "grammaire du rêver".

mardi 15 octobre 2024

1. Préliminaires à une lecture de la Traumdeutung de Freud: une philosophie de l'esprit inconscient, une forme nouvelle de réflexivité sociale sur l'individu moderne

Références bibliographiques

S. Freud, L'Interprétation du rêve, OCP IV, 2003, PUF. (voir en ligne)

S. Freud, L'Interprétation des rêves, tr. fr. J.-P. Lefebvre, 2010, Seuil.

S. Freud, L'Interprétation/La Science des rêves, tr. fr. I. Meyerson, entièrement révisée par D. Berger, 1926, 1967², PUF.

D. Anzieu, L'Auto-analyse de Freud et la découverte de la psychanalyse, vol.1 et 2, 1975², PUF (pas l'édition réduite en un seul volume).

D. Bourdin, Sigmund Freud, L'Interprétation des rêves, 2005, Bréal (un aide-mémoire précis et utile).

P.-H. Castel, Introduction à L'Interprétation du rêve de Freud. Une philosophie de l'esprit inconscient, PUF, 1998. Voir notamment l'Avant-propos et la préface de ce livre, ainsi que mon Résumé analytique de la Traumdeutung.

A. Mayer & L. Marinelli, Rêver avec Freud. L'histoire collective de L'Interprétation du rêve, Aubier, 2009.

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(Enregistrement de la séance)

A/ Introduction: programme d'études de ce séminaire

1. La Traumdeutung comme un grand texte de philosophie de l'esprit. Un Traité de l'âme d'ambition aristotélicienne (l'âme entéléchie du corps vivant, la question de l'essence ou de l'essentiel dans le vivant-pensant), mais pour l'individu moderne (qui n'est pas censé posséder une âme "animante", Seele, mais un "psychisme" objectivable). Locke/Leibniz, Hume (Traité de l'entendement humain), mais aussi Nietzsche ou Wittgenstein: sauf que la "métapsychologie" se substitue à la métaphysique. La visée est philosophique: une réarticulation conceptuelle à la fois causale et sémantique et surtout générale-intégratrice de la vie de l'esprit subjectif. Le problème de l'intentionnalité non-consciente/inconsciente. Enjeu final du gnôthi seauton de la Traumdeutung: le rêveur immoral. La qualité éthique de l'individu (sain ou malade) ne s'évalue plus à sa (bonne) volonté, mais à l'articulation plus ou moins maîtrisée de son désir.

2. Mais ce texte qui est une théorie générale de l'esprit a également institutionnalisé une nouvelle forme de réflexivité collective (la psychanalyse, ses controverses) en lien immédiat avec une nouvelle pratique thérapeutique-émancipatrice: l'association libre sur les rêves (les symptômes, les fantasmes), dans la cure-type. 

Sortir du cliché d'une critique du moi conscient des seuls philosophes. C'est la réflexivité exigible d'un projet de vérité sur soi "par soi" typique de l'individualisme moderne (son idéal d'autonomie). Contexte éliasien de ma démarche: la Selbstzwang (autocontrainte), pierre de touche de l'agent social fiable quand les contraintes physiques externes diminuent. Regarder "dans les yeux" les pulsions et fixations (infantiles perverses) qui s'opposent à ce projet d'autocontrôle, lequel rend enfin effective l'autonomie dans l'individu.

Le Freud auteur de la Traumdeutung: un Juif libéral en Autriche-Hongrie avant 1914. Rationalisme progressiste des Lumières, universalisme, scientisme, historicisme, économisme. Or les conditions d'émergence de la psychanalyse (avec la théorie du rêve comme intégrateur "métapsychologique" en 1900) ne sont pas celles de son développement et de son extension (de l'inclusion, y compris comme "erreur exemplaire", du "mouvement psychanalytique" dans le "processus de civilisation" moderne, au-delà de Freud).

Après Freud, donc, examiner le kleinisme (Meltzer contre la Traumdeutung), ou Lacan (le rêve n'est plus qu'un domaine où s'illustre les "jeux du signifiant"), Bion enfin (le rêver-processus, dreaming, devient l'acte psychique par excellence, mais il s'ensuit une inversion/dialectisation radicale des motifs-clés de la Traumdeutung). Or tout cela s'appuie sur des pratiques (des procédés techniques) et des idéaux thérapeutiques-émancipateurs ainsi que sur des compréhensions idéologiques-sociales du "malaise dans la culture" (et donc des types de patients "psychanalysables") chaque fois très distincts.

3. Problème méthodologique: un double parallèle à justifier. a) Une lecture épistémologique "expressiviste" de l'émergence et de la stabilisation des concepts-clés de la doctrine psychanalytique du rêve/rêver à partir des pratiques effectives. b) Une seconde mise en parallèle desdites pratiques avec les attentes normatives, mais aussi les contraintes structurales, qui régissent la quête d'une guérison-libération "psychique" dans le cadre des sociétés individualistes modernes en évolution. Ce que cette méthode a de général pour la philosophie des sciences sociales.

4. L'hypothèse ultime de cette lecture élargie (mise en perspective socio-historique longue de son projet) de la Traumdeutung. D'abord une connexion suggestive entre philosophie de l'esprit (de la connaissance, épistémologie) et sociologie historique de la connaissance (analyse à la Durkheim, Formes élémentaires de la vie religieuse) de l'émergence et de la lutte continuée pour la pertinence de catégories réflexives générales à portée critique (inconscient sexuel, refoulement, Œdipe, etc.). Ensuite (à la Elias) l'idée qu'une évolution réelle des appareils psychiques des individus eux-mêmes, après et à cause des théories psychanalytiques du rêve. Pas une élucidation nouvelle de l'essence de l'esprit; mais une évolution du fonctionnement psychique des individus modernes. On ne rêve plus après Freud comme avant; et c'est une affaire de "grammaire du rêver".

5. Méthode de travail du séminaire.

B/ Premières hypothèses et questions sur l'évolution de la théorie psychanalytique du rêve après Freud.

C/ De la nouvelle "grammaire du rêver" aux mutations de l'expérience de l'intériorité subjective: quelques clarifications.



mardi 7 mai 2024

Le mouvement psychanalytique au 20e siècle. Histoire conceptuelle, philosophie de l’esprit et sociologie de la connaissance (annonce du séminaire 2024-2025)

Programme

En quel sens les concepts éminemment « psychologiques » de la psychanalyse, et ce qu’ils prétendent faire connaître du « sujet individuel », sont en vérité des catégories sociales – i.e. des catégories de la connaissance réflexive sociologiquement et historiquement déterminées ? Poser cette question est dérangeant : la psychanalyse a souvent revendiqué une position d’extériorité par rapport au social, soit par la voie naturaliste (Freud), soit au risque de généralités quasi métaphysiques (Lacan). La justifier exigera, donc, de prendre en considération, quand on entreprend l’histoire conceptuelle de la psychanalyse au XXe siècle, les métamorphoses de la socialisation individualiste, ses multiples crises dans les sociétés modernes, et les remèdes qu’on leur a imaginés, dont, entre autres, le divan. Mais plutôt qu’offrir une nième mouture de l’« histoire culturelle » des influences qui ont façonné les théories freudiennes et post-freudiennes, ce séminaire ambitionne de cerner de plus près le parallèle éliasien entre sociogenèse et psychogenèse tout du long du processus de civilisation, autrement dit, d’appréhender la réflexivité psychanalytique à l’aune des paradoxes de ce processus et des épreuves individuelles et collectives qu’il implique. Projet bien différent de celui d’une critique épistémologique in abstracto de la psychanalyse. Avec cela, argumentera-t-on, l’enjeu de l’objectivité des notions psychanalytiques ne disparaît nullement ; il est au contraire réélaboré, mais à la lumière d’une philosophie sociale de l’esprit, pragmatiste et expressiviste.

Dans ce double esprit, le séminaire de cette année prendra la forme d'un cours qui consistera 1) en un commentaire conceptuel de L'interprétation du rêve de Freud, s'ouvrant sur les transformations de ce procédé singulier dans l'histoire de la psychanalyse au XXe siècle; et 2) en une lecture de la traduction (en cours) de la biographie de Freud par Joel Whitebook, Freud. An Intellectual Biography (Cambridge UP, 2017).

mardi 26 mars 2024

10. Le Cas Aimée : la signification psychanalytique d’un « délire public » (D. Guével et M. Figueiroa Nunez)

 Bibliographie

J. Lacan, 1932, De la psychose paranoïaque dans ses rapports avec la personnalité, Paris, Seuil (particulièrement Partie II, chapitres 1 et 3).

J. Allouch, 1986, Marguerite ou l’Aimée de Lacan, Epel.

N. Elias, 1990, « Le terrorisme en République fédérale : expression d’un conflit de générations », in Les Allemands, Paris, Seuil.

A. Lilti, 2012, « The Writing of Paranoia : Jean-Jacques Rousseau and the Paradoxes of Celebrity ».

M. Mauss, « Rapports réels et pratiques de la psychologie et de la sociologie. » In Sociologie, psychologie, physiologie, édité par Astrid Chevance, Julien Clément, et Florence Weber, Série Mauss 9, Paris, PUF, 2021.

B. Karsenti, 2011, « La psychose, une catégorie sociologique. » et « Conclusion. », in L’Homme total, Paris, PUF.

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Introduction, présentation du cas

I. Des réponses psychanalytiques pour des questions psychiatriques

a. L'institution psychiatrique après la Grande Guerre.

b. Les paradigmes psychiatriques face à la paranoïa

c. La réponse de Lacan : une trahison ambitieuse à partir de la théorie freudienne

II. Un « délire public » ? La paranoïa comme expression des tensions de la sphère publique

a. Le vertige moderne du public

b. Aimée, la réussite sociale, l’échec privé

c. Quelle place pour le « délire public » en psychanalyse ?

III. Le cas Aimée peut être lu dans le cadre d'une réflexion plus large sur le social

a. Mauss, « Rapports réels et pratiques de la psychologie et de la sociologie »

b. La lecture de l'homme total par Bruno Karsenti permet de situer le social selon Mauss et de penser le cas Aimée comme une réponse à cette problématique.


mercredi 20 mars 2024

9. Jalons éliasiens pour une socio-histoire des évolutions du "surmoi" (de l'autocontrainte en régime de formalisation puis d'informalisation) (3.)

Bibliographie

Beck U., La Société du risque. Sur la voie d'une autre modernité, trad. franç., Flammarion, 2008.

Bergmann M., "La dynamique de l'histoire de la psychanalyse: Anna Freud, Leo Rangell et André Green", in G. Kohon (dir.), Essais sur La Mère morte, Ithaque, 2009.

Castel P.-H., "lnformalisation et vie psychique : un programme de recherche éliasien. La « crise du moi » chez les psychanalystes et les moralistes critiques de la modernité récente, et l’invention de la catégorie d’états-limites", Sociologie politique de Norbert Elias. Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, 2022.

Castel P.-H. "Narcissisme et processus de civilisation. Pour une lecture sociologique", Zilsel, vol. 8, no. 1, 2021, pp. 204-221.

Ducasse D. & Brand-Arpon V., Le Trouble borderline expliqué aux proches, Odile Jacob, 2021.

Elias N., Au-delà de Freud. Sociologie, psychologie, psychanalyse. La découverte, 2010.

Estellon V., Les Etats-limites, PUF, 2014.

Green A., "L'analyste, la symbolisation et l'absence" (1974), repris in La Folie privée, Gallimard, 1990.

Wouters C. &  Dunning M., Civilisation and Informalisation. Connecting Long-Term Social and Psychic Processes. Springer, 2019.

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A/ Introduction

B/ L'écologie intellectuelle et sociale du surmoi freudien

1. Aller plus loin que la simple homologie formelle surmoi/Selbstzwang. Le champ conceptuel du surmoi, et sa projection future (Duso): l'Œdipe, le remplacement de l'inconscient de la première topique par le ça, l'identification au père comme idéalisation mortifère, le "malaise dans la culture". L'extension-approfondissement du surmoi, ou la dynamique de transformation conceptuelle de la notion en psychanalyse (M. Klein, le refus de l'idée de pulsion de mort).

Une difficulté centrale pour l'argument: de l'idéal du moi (Freud) à l'idéal du nous (Elias). La même analyse vaut-elle pour le surmoi? Le mode de présence des idéaux sociaux à l'"intérieur" de l'individu (examen de la solution de B. Karsenti).

2. Retour sur la Selbstzwang de ce point de vue étendu: une hypothèse sur le dédoublement du surmoi, celui des névroses de transfert (curables) et celui des névroses narcissiques (incurables), voire des névroses "de caractère" (manipulables émotionnellement, mais pas par une cure psychanalytique). La somme de Giovacchini sur les borderlines.

3. Connexion avec les enjeux conceptuels: Green sur le déplacement de l'autocontrainte interne à l'autocontrainte sensible au "cadre". Analyse d'un texte (Green 12 et 3). Le "cadre" en ce sens est-il le nouveau surmoi, mais externalisé ? Ou bien est-ce le soi (un idéal d'auto-contenance) ? Sur le soi "autocontenant" (Winnicott), importance de la contribution de M. Klein.

C/ Le contexte large de l'émergence des états limites: la crise morale de l'individualisme libéral-démocratique et le "péril du narcissisme": métamorphoses de l'autonomie moderne en contexte de démocratisation fonctionnelle (Elias)

1. Réarticuler psychogenèse (indexée sur l'émergence des états limites) et sociogenèse. Trois directions d'enquête:

  • La division du travail contemporaine, les services et le secteur tertiaire, et la régulation des émotions (par exemple Hochschild). "La force des liens faibles" (Granovetter).
  • Le poids de l'égalité croissante, mais partielle entre les sexes (les états limites, pathologies "féminines" et "juvéniles").
  • Les paradoxes inhérents au processus de civilisation "avancé", informalisation contrariée et "société du risque" (Beck).

Les "pêcheurs dans le maelström" (Elias): les défis de l'individualité dans les formes "avancées" de la modernité, et leur horizon pathologique propre.

2. Les états limites, enjeu idéologique: le "narcissisme" individualiste contemporain (Lasch et Sennett). Le mythe du "relâchement" de la règle sociale (Wouters, Ehrenberg). Paradoxes et risques du "relâchement contrôlé du contrôle". 

3. Un "au-delà" du surmoi? L'informalisation comme néo-contrainte "au-delà" du surmoi classique? Un soi autocontenant, autonome et "anarchique": idéal implicite de la dimension psychogénétique de l'informalisation. A cette aune, mesurer le décalage entre les thérapies psychanalytiques visant l'identification au Père et celles du laisser-être, du "jeu" à rendre au sujet. Problèmes majeurs auxquels se heurtent ces conceptions irénistes de la thérapie.

Retour final sur Green: le risque de l'échec de cette "contenance" et du retour en force d'un surmoi encore plus cruel.

samedi 10 février 2024

8. Jalons éliasiens pour une socio-histoire des évolutions du "surmoi" (de l'autocontrainte en régime de formalisation puis d'informalisation) (2.)

Bibliographie

Incidence, 2007, n°3, Le Surmoi, genèse politique. Textes de Kelsen et Federn, commentés, notamment, par E. Balibar et P. Macherey.

Bergmann M., "La dynamique de l'histoire de la psychanalyse: Anna Freud, Leo Rangell et André Green", in G. Kohon (dir.), Essais sur La Mère morte, Ithaque, 2009.

Castel P.-H., "lnformalisation et vie psychique : un programme de recherche éliasien. La « crise du moi » chez les psychanalystes et les moralistes critiques de la modernité récente, et l’invention de la catégorie d’états-limites", Sociologie politique de Norbert Elias. Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, 2022.

Castel P.-H. "Narcissisme et processus de civilisation. Pour une lecture sociologique", Zilsel, vol. 8, no. 1, 2021, pp. 204-221.

Castel P.-H., La Fin des coupables, suivi de Le Cas Paramord. Obsessions et contrainte intérieure, de la psychanalyse aux neurosciences, Ithaque, 2012.

Ducasse D. & Brand-Arpon V., Le Trouble borderline expliqué aux proches, Odile Jacob, 2021.

Elias N., Au-delà de Freud. Sociologie, psychologie, psychanalyse. La découverte, 2010.

Estellon V., Les Etats-limites, PUF, 2014.

Freud S., Le Moi et le Ça (1923) in Œuvres complètes de Freud / Psychanalyse XVI, PUF, 1991.

Giovacchini P., Borderline Patients: The Psychosomatic Focus, and the Therapeutic Process. Jason Aronson, 1993. (Une conférence devant l'Association internationale Interactions de la psychanalyse s'appuie notamment sur ce classique).

Green A., "L'analyste, la symbolisation et l'absence" (1974), repris in La Folie privée, Gallimard, 1990.

Wouters C. &  Dunning M., Civilisation and Informalisation. Connecting Long-Term Social and Psychic Processes. Springer, 2019.

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A/ Introduction

B/ L'écologie intellectuelle et sociale du surmoi freudien

1. Aller plus loin que la simple homologie formelle surmoi/Selbstzwang. Le champ conceptuel du surmoi, et sa projection future (Duso): l'Œdipe, le remplacement de l'inconscient de la première topique par le ça, l'identification au père comme idéalisation mortifère, le "malaise dans la culture". L'extension-approfondissement du surmoi, ou la dynamique de transformation conceptuelle de la notion en psychanalyse (M. Klein, le refus de l'idée de pulsion de mort).

Une difficulté centrale pour l'argument: de l'idéal du moi (Freud) à l'idéal du nous (Elias). La même analyse vaut-elle pour le surmoi? Le mode de présence des idéaux sociaux à l'"intérieur" de l'individu (examen de la solution de B. Karsenti).

2. Retour sur la Selbstzwang de ce point de vue étendu: une hypothèse sur le dédoublement du surmoi, celui des névroses de transfert (curables) et celui des névroses narcissiques (incurables), voire des névroses "de caractère" (manipulables émotionnellement, mais pas par une cure psychanalytique). La somme de Giovacchini sur les borderlines.

3. Connexion avec les enjeux conceptuels: Green sur le déplacement de l'autocontrainte interne à l'autocontrainte sensible au "cadre". Analyse d'un texte (Green 12 et 3). Le "cadre" en ce sens est-il le nouveau surmoi, mais externalisé ? Ou bien est-ce le soi ?

mardi 6 février 2024

7. Jalons éliasiens pour une socio-histoire des évolutions du "surmoi" (de l'autocontrainte en régime de formalisation puis d'informalisation) (1.)

Bibliographie

Bergmann M., "La dynamique de l'histoire de la psychanalyse: Anna Freud, Leo Rangell et André Green", in G. Kohon (dir.), Essais sur La Mère morte, Ithaque, 2009.

Castel P.-H., "lnformalisation et vie psychique : un programme de recherche éliasien. La « crise du moi » chez les psychanalystes et les moralistes critiques de la modernité récente, et l’invention de la catégorie d’états-limites", Sociologie politique de Norbert Elias. Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, 2022.

Castel P.-H. "Narcissisme et processus de civilisation. Pour une lecture sociologique", Zilsel, vol. 8, no. 1, 2021, pp. 204-221.

Castel P.-H., La Fin des coupables, suivi de Le Cas Paramord. Obsessions et contrainte intérieure, de la psychanalyse aux neurosciences, Ithaque, 2012.

Ducasse D. & Brand-Arpon V., Le Trouble borderline expliqué aux proches, Odile Jacob, 2021.

Elias N., Au-delà de Freud. Sociologie, psychologie, psychanalyse. La découverte, 2010.

Estellon V., Les Etats-limites, PUF, 2014.

Freud S., Le Moi et le Ça (1923) in Œuvres complètes de Freud / Psychanalyse XVI, PUF, 1991.

Giovacchini P., Borderline Patients: The Psychosomatic Focus, and the Therapeutic Process. Jason Aronson, 1993. (Une conférence devant l'Association internationale Interactions de la psychanalyse s'appuie notamment sur ce classique).

Green A., "L'analyste, la symbolisation et l'absence" (1974), repris in La Folie privée, Gallimard, 1990.

Wouters C. &  Dunning M., Civilisation and Informalisation. Connecting Long-Term Social and Psychic Processes. Springer, 2019.

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(Enregistrement de la séance)

A/ Introduction

1. Test de l'hypothèse: non pas un cas particulier de l'évolution du mouvement psychanalytique au sein du processus de la modernité (la psychanalyse des enfants), mais la forme générale de l'évolution de l'autocontrainte, du surmoi freudien à son "successeur" = x.

2. Difficultés diverses:

  • Un rapport toujours dialectique entre formalisation et informalisation (de l'un à l'autre et retour).
  • Le "successeur" = x du surmoi n'a pas d'auteur "modernisateur".
  • Quelle pathologie psychique de masse pour ce successeur ? L'hypothèse des borderlines (états-limites).
  • Le problème d'une périodisation à la fois sociogénétique et psychogénétique.

B/ L'écologie intellectuelle et sociale du surmoi freudien

C/ La crise morale de l'individualisme libéral-démocratique et le péril du "narcissisme": les métamorphoses de l'autonomie moderne et les paradoxes du "relâchement contrôlé du contrôle". 

mardi 23 janvier 2024

6. Le cas du petit Hans : comment analyser un enfant et qu’est-ce qu’un cas clinique ? (M. Figueiroa Nunez et P.-F. Mouraud)

Bibliographie

Ayouch, Thamy. « « Réglons-lui son cas ». Psychanalyse, récits cliniques, enjeux ». Psychologie Clinique 44, no 2 (2017): 99 114. https://doi.org/10.1051/psyc/20174499.

Bergeret, Jean. L’élaboration du cas, dans Le Petit Hans et la réalité ou Freud face à son passé. Science de l’homme. Paris: Payot, 1987.

Visentini, Guénaël. Introduction à Penser et écrire par cas en psychanalyse: l’invention freudienne d’un style de raisonnement. Paris: PUF, 2024.

Bonomi, Carlo. « Is the Oedipus Complex an Iatrogenic Theory? Book Essay on Jerome C. Wakefield, Freud’s Argument for the Oedipus Complex: A Philosophy of Science Analysis of the Case of Little Hans (Routledge, 2023) and Attachment, Sexuality, Power: Oedipal Theory as Regulator of Family Affection in Freud’s Case of Little Hans (Routledge, 2023) ». International Forum of Psychoanalysis, 8 janvier 2024, 1 12. https://doi.org/10.1080/0803706X.2023.2273784 

Wakefield, Jerome C. Attachment, Sexuality, Power: Oedipal Theory as Regulator of Family Affection in Freud’s Case of Little Hans. 1re éd. New York: Routledge, 2022. https://doi.org/10.4324/9780203817124.

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1. L’histoire du petit Hans : dans quelle mesure Freud a-t-il été impliqué dans le traitement ? quelle est la place de Freud dans la symptomatologie d'Herbert Graf ?
a. Les parents, l’enfant et Freud. 
b. Une approche de l'enfance à partir d'une théorie de l'enfance (Trois essais sur la théorie sexuelle).

2. Le problème de l’écriture du cas en psychanalyse. Freud juge et partie dans l’analyse. 
a. Le cas du petit Hans pour prouver les concepts de la psychanalyse d’adultes : Freud dans les coulisses de sa propre théorie.  
b. Théories sur ce qu'est un cas.

3. Critique du Petit Hans, séparation et autonomie. 
a. Wakefield. Le complexe d'Œdipe comme théorie nuisible qui sexualise la relation mère-enfant. 
b. Le complexe d’Œdipe comme réponse a un besoin d’autonomie.

Conclusion-ouverture. Qu’est-ce qu’un cas ? 


lundi 8 janvier 2024

5. Naissance et développement de la psychanalyse d'enfant au 20e siècle: un programme d'études (suite)

 Bibliographie

P.-H. Castel, Mais pourquoi psychanalyser les enfants? Un rituel thérapeutique dans les sociétés modernes, Cerf, 2021 (voir aussi un exposé sur ce livre en lien avec le thème du séminaire, ici).

J. Wakefield, "L’anti-Œdipe du point de vue de la philosophie des sciences et des perspectives foucaldiennes du savoir-pouvoir", InAnalysis (2023) 7: 1-9.

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(Enregistrement de la séance)

A/ Introduction: Revisiter et amplifier une enquête antérieure à partir de la problématique du séminaire.

1. L'enfance des modernes et le processus de civilisation d'Elias; l'histoire de l'enfance sur le temps long, les ruptures propres à la modernité.

2. L'enfance comme observatoire remarquable de la psychogenèse; la "civilisation des parents".

B/ La psychanalyse des enfants comme source constante de "modernisation" du freudisme (Anna Freud, Melanie Klein, Winnicott), et en ce sens comme acteurs du mouvement s'accélérant de la modernité.

1. Les repères principaux posés par le cas du "Petit Hans": les quatre dimensions de l'Œdipe dans le cadre de la sexualité "en deux temps" et de la théorie des névroses (séparation-individuation de l'enfant par rapport aux parents, économie de la rivalité avec les frères et sœurs, mise en réserve de la sexualité infantile comme "promesse" d'une sexualité adulte future, élaboration psychique qui permette, après la puberté, de négocier l'angoisse d'un choix d'objet non-prescrit). Elles sont implicites chez Freud (sauf la séparation-individuation) et s'explicitent tout au long de l'histoire du mouvement psychanalytique.

2. Le petit Hans est-il "pathologiquement" phobique? Ou bien la phobie (en lieu à la castration) est-elle la pathologie "normale" de tout enfant dans la modernité individualiste (confronté à l'autonomisation personnelle comme séparation, assomption de l'identité de genre/sexuelle, etc.)? Différence d'approche avec les polémiques épistémologiques sur la phobie de Hans (d'Eysenck à Wakefield).

3. L'articulation socio-historique de cette forme œdipienne aux réformes sociales tout au long du 20e siècle (via, également, la puériculture, les pédagogies "nouvelles" ou la gestion de "l'enfance délinquante"). C'est en ce sens que les psychanalystes d'enfants sont des modernisateurs.

4. Quelques pistes de réflexion sur A. Freud, M. Klein, D.W. Winnicott et F. Dolto, en fonction de cette idée de "modernisation" de l'Œdipe.

C.  Conclusion. La contribution des concepts-clés de la psychanalyse d'enfant à la réflexivité sociale touchant l'autonomie individuelle et son acquisition toujours plus précoce.

1. Insister sur l'homogénéité relative des pratiques thérapeutique malgré l'hétérogénéité des théories.

2. Et aujourd'hui? La "crise" de l'Œdipe à la lumière du processus d'informalisation.

3. Différences avec le projet poursuivi dans Mais pourquoi psychanalyser les enfants?